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Les approches actives en ligne

Encore une fois, il m'est difficile de discuter d'approches actives en ligne sans faire référence à mon passé en philosophie. Faut-il rappeler que l'exposé magistral est encore fortement utilisé en philosophie : Desautels (2004) mentionne que  62% des professeurs du Cégep régional de Lanaudière disent utiliser fréquemment l’exposé magistral. Cette statistique provient du troisième cours de philosophie qui est certainement le plus concret des trois. Par ailleurs, au risque de me répéter, je n'ai jamais vécu d'approches autres que l'enseignement magistral au baccalauréat en philosophie. Le terrain de jeu est donc encore inexploité et les possibilités sont grandes. On peut cependant imaginer que de nouvelles approches seraient accueillies plus froidement par les départements de philosophie qui souhaitent bien souvent respecter une certaine tradition d'enseignement. Il faut de plus noter que le domaine de « l'histoire de la philosophie », qui ne consiste qu'à lire des textes philosophiques et à en comprendre le sens, offre peu de possibilités, à première vue du moins, de s'adapter au monde concret des étudiants. D'un autre côté, nous pouvons nous demander pourquoi une partie du domaine de la philosophie peine à être de son époque. Après tout, Platon n'écrivait qu'en dialogue, Descartes voulait comprendre qui il était et Hume cherchait à connaitre la source de nos connaissances. Certes, aller au fond des choses, mais pour mieux comprendre ce qui nous entoure.

Et je crois précisément qu'en rendant les étudiants dans un cours de philosophie plus actifs, ils pourront donner du sens à leurs connaissances « philosophiques ». Et, l'approche par problème, par exemple, est une bonne manière d'y arriver, les questions des philosophes provenant bien souvent d'observations de problème concrets issus du monde qui les entourait. Ainsi, je proposerai dans mon design pédagogique de mettre en ligne et à distance un tel APP qui utiliserait notamment wikispaces pour permettre une partie collective à l'apprentissage. Ajoutons que l'on ne peut ignorer, malgré la statistique mentionnée ci-haut, que l'éthique offre la possibilité d'utiliser la méthode des cas pour enseigner la théorie de nombreux auteurs qui ont voulu décider de la moralité d'un geste ou d'une action, nécessairement concrète. Il suffit bien souvent, et ce, autant pour l'APP que la méthode des cas, d'adapter ces activités pour que la partie « recherche » consiste en la lecture des oeuvres de première main, c'est-à-dire des auteurs auxquels on souhaite initier les élèves. Ainsi, suite à la lecture d'un problème, les élèves développent une solution qu'ils peuvent ensuite confronter à la solution de l'auteur qu'ils ont à lire. Cela permet notamment de créer un conflit cognitif et de confronter la position d'un auteur avec celle de l'étudiant. L'APP ou la méthode des cas deviennent alors une façon pour faire réfléchir les étudiants sur des questions qui sortent de notre vie quotidienne : après tout, ce n'est pas tout le monde qui se demande spontanément ce qui m' assure que le clavier sur lequel j'écris présentement est réel. Également, de telles approches ne modifient pas fondamentalement l'enseignement de la philosophie qui doit se faire, en bonne partie, par la lecture d'oeuvres importantes.

Il ne s'agit ici qu'un d'un exemple, mais il ne fait aucun doute qu'il faut augmenter le nombre de pédagogies actives dans le domaine de la philosophie, y compris dans son mode « à distance ». Je crois que ces pédagogies peuvent réellement être un moyen au service de l'apprentissage des étudiants.

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Desautels, L. (2004). Le cours de philosophie éthique propre au programme au collégial: bilan d'une étude exploratoire, descriptive et évaluative de la situation actuelle. Cégep régional de Lanaudière à L'Assomption, 275 p.

Commentaires

  1. Bonjour Antoine, ton texte est intéressant. Tu mets en évidence par une expérience personnelle un constat où l'enseignement de la philosophie a de nombreux défis à relever. J'ai bien hâte de voir la proposition que tu vas faire pour rendre les apprenants actifs et surtout, il serait intéressant qu'un enseignant puisse mettre en oeuvre ta formation et ensuite, voir dans quelle mesure cette innovation pédagogique sera perçue par ces derniers qui utilisent qu'une seule approche pédagogique dans l'enseignement, c'est-à-dire l'exposé magistral. À suivre ;)

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  2. Salut Antoine !

    J’ai eu beaucoup de plaisir à lire ton billet sur les approches actives en philosophie. Comme toi, je crois que c’est une discipline qui a beaucoup de potentiel à cet égard, même si la tradition tend plutôt vers l’inverse.

    Tes idées d’études de cas et d’approche par problème sont très intéressantes. Cela dit, as-tu pensé que ce pourrait être la tâche de tes étudiants d’effectuer le transfert des philosophies étudiées à aujourd’hui? À mon sens, ce pourrait être une belle façon de développer leur compréhension et d’y donner du sens. Tu pourrais être surpris par les liens que les étudiants peuvent faire. En début d’année, je définis toujours la Grande Littérature avec mes étudiants. Une des caractéristiques qui lui permet de traverser le temps, c’est qu’elle est le reflet des préoccupations de la société. Cela implique que les œuvres mises au programme sont jugées encore pertinentes aujourd’hui pour comprendre le monde et les gens qui l’habitent. Bref, je me fais régulièrement un malin plaisir de demander à mes étudiants de m’expliquer en quoi/pourquoi une œuvre particulière est encore pertinente aujourd’hui.

    Dans le même ordre d’idées, j’ai l’impression que plusieurs enseignants de philo se sentent encore responsables de présenter « la bonne interprétation » d’une pensée philosophique donnée. Si je transpose cette situation à la littérature, ce serait comme faire un cours lors duquel l’enseignant expose « la bonne interprétation de l’œuvre », ce qu’il faut en comprendre et en quoi elle est pertinente. Une telle démarche va à l’encontre du développement potentiel d’une pensée critique, puisqu’elle repose sur la restitution d’une connaissance préconstruite. Pourquoi ne pas bâtir cette compréhension avec les étudiants, à travers leur interprétation et leur compréhension de la pensée du ou des philosophes étudiés?

    Bonne réflexion !

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